Publié le 25 juin 2025
À peine rentrée de Sint-Michielsgestel, aux Pays-Bas, où se tenait le prestigieux workshop « Methods in Clinical Cancer Research » (MCCR) – organisé conjointement par l’EORTC, l’ESMO et l’AACR – la Pre Fernanda Herrera, cheffe du Service de radio-oncologie du CHUV et Professeure ordinaire à l’Unil, partage ses impressions encore toutes fraîches. Vingt ans après y avoir présenté ses premiers protocoles comme jeune clinicienne, elle y est retournée cette année en tant que membre du corps professoral : un passage de relais vibrant qui lui a permis d’accompagner la nouvelle génération dans la conception d’essais cliniques innovants intégrant recherche translationnelle, biopsies tumorales et analyses sanguines – pierres angulaires de la médecine personnalisée. À ses côtés, la Dre Carolina Cauduro, sélectionnée pour défendre son propre projet de phase I en oncologie gynécologique, a-t-elle aussi fait rayonner l’expertise du CHUV. Dans l’entretien qui suit, la Pre Herrera revient sur l’énergie contagieuse du MCCR et sur les perspectives qu’elle ramène pour nos équipes.
Rencontre.
C’est encore tout frais ! Le MCCR, c’est une semaine d’énergie pure : des journées intenses, des débats passionnés jusque tard le soir et une émulation incroyable entre mentors et participants. On sent réellement que chaque idée peut, à terme, améliorer la prise en charge des patients. Je suis revenue pleine d’enthousiasme… et avec quelques heures de sommeil à rattraper !
La vie à l’intérieur du workshop est très intense. Les matinées sont consacrées à des sessions de formation, suivies l’après-midi de travaux en petits groupes sur le développement de protocoles. Chaque groupe est encadré par des mentors — statisticiens, oncologues médicaux, radio-oncologues ou chirurgiens oncologues — qui conseillent les participants sur la conception de l’étude clinique qu’ils ont apportée, et pour laquelle ils ont été sélectionnés à l’issue d’un processus très compétitif. Pour ma part, j’ai eu la chance d’intégrer un groupe dédié à la recherche en oncologie gynécologique.C’est une expérience fascinante : on est vraiment plongé dans les coulisses de la création d’un essai clinique — c’est la “vraie cuisine” de la recherche.
Absolument. Marcher à nouveau dans ces salles, mais cette fois pour guider d’autres cliniciens, m’a émue. J’ai réalisé le chemin parcouru : de la présentation de mes premiers protocoles à la transmission de mon expérience. C’est un rappel puissant que la recherche est un continuum ; chacun reçoit, progresse, puis transmet à son tour.
Je dirais que ce sont ces trois caractéristiques qui la rendent vraiement unique :
Sans hésiter, la séance où ma mentorée, la Dre Carolina Cauduro, a défendu son projet sur le cancer du col de l’utérus. Voir son assurance grandir sous les questions pointues du jury et sentir la salle adhérer à ses idées a été un vrai frisson. J’ai revu mes propres débuts dans son regard !
Le deuxième moment fort de la semaine est survenu jeudi, à peine cinq minutes après que Carolina a soumis la version finale de son protocole.
Nous avons reçu une excellente nouvelle : le projet a été classé deuxième sur les 23 soumis dans le cadre de l’appel à projets de la Ligue contre le cancer — ce qui signifie que nous avons obtenu le financement pour lancer la mise en place de l’essai clinique !
C’est un échange à double sens : je partage mon expérience stratégique, et elle me transmet sa fraîcheur d’approche et sa créativité méthodologique. Ensemble, nous avons affiné un protocole phase II avec un solide volet translationnel, intégrant biopsies tumorales et analyses sanguines – la médecine personnalisée en action.
Je reviens avec des idées concrètes pour optimiser nos propres essais précoces et renforcer les collaborations nationales et internationales. Surtout, j’emporte une motivation renouvelée à insuffler la culture MCCR : curiosité, rigueur et partage. Nous prévoyons déjà de mettre le protocole de Carolina en oeuvre avec le groupe SAKK.
Osez ! Préparez un projet ambitieux mais ancré dans la réalité clinique et soyez ouverts aux critiques – elles sont votre meilleur accélérateur. Et souvenez-vous : au-delà des protocoles, ce sont les rencontres qui changent une carrière.
Propos recueillis par Janette Danko